dimanche 17 juin 2012


Éduquer au numérique : il y a urgence !

13 juin 2012
Par 
Olivier Ertzscheid, maître de conférences à l’université de Nantes, publiait au mois d’avril un article dans Le Monde intitulé “Et si on enseignait vraiment le numérique ?“. Après l’espoir suscité par les possibilités offertes par le web (cf la déclaration d’indépendance du cyberespace de John Perry Barlow en 1996), l’auteur estime qu’au jour d’aujourd’hui, il ne reste plus rien de cette déclaration d’indépendance. Les contenus du web sont de plus en plus privatisés :
“la plus grande partie du cyberespace est un monde fermé, contrôlé par le marketing, régi par un carcan de normes arbitraires, de lois liberticides et de technologies “privatives”. Un monde hyperterritorialisé sous le contrôle de quelques multinationales.”
Cette évolution rend encore plus nécessaire une éducation au numérique, à ne pas confondre avec un enseignement informatique autour du code, de la programmation. L’important n’est pas de savoir programmer (voir la traduction sur Framasoft de l’article Please, don’t learn to code), mais plutôt de savoir publier :
“Enseigner l’activité de publication et en faire le pivot de l’apprentissage de l’ensemble des savoirs et des connaissances. (…) l’impossibilité de maîtriser un “savoir publier”, sera demain un obstacle et une inégalité aussi clivante que l’est aujourd’hui celle de la non-maîtrise de la lecture et de l’écriture, un nouvel analphabétisme numérique hélas déjà observable.”
En effet, être équipé d’outils numériques ne signifie nullement que les personnes sachent utiliser ces outils. L’accès à ces outils se démocratise, ce qui tend à réduire petit à petit la fracture numérique, mais une nouvelle fracture numérique se dessine. C’est la thèse relayée par l’article de Xavier de la Porte sur le site Internet Actu : Perdre son temps, la nouvelle fracture numérique, article qui se fait l’écho d’un autre article américain du New York Times. Les enfants des familles les plus pauvres passent plus de temps devant les écrans (télévision, réseaux sociaux, jeux, etc.) que les autres. Leurs parents surveillent moins ce qu’ils en font. Les ordinateurs et autres écrans sont massivement utilisés à des fins de divertissement et non pas pour un usage éducatif ou de création de contenu. La fracture numérique prend une autre forme, celui du “temps gaspillé“.
“Même si les enfants de familles éduquées jouent aussi beaucoup, le défi est donc accru pour les parents et enfants de familles défavorisés, ceux qui étaient censés profiter de la réduction de la fracture numérique. L’article montre ensuite que les conséquences peuvent parfois être désastreuses, notamment pour la scolarité.”
Le constat n’est certes pas nouveau, mais le phénomène s’amplifie. Je termine par une deuxième citation de Xavier de la Porte :
” ce que notent les chercheurs, c’est l’accroissement de l’écart, en temps et usage, un accroissement dû, et c’est un paradoxe à des politiques bienveillantes de démocratisation de l’accès. L’exemple américain pourrait inspirer une politique numérique en montrant qu’elle doit tenir sur deux jambes : accès d’un côté, éducations aux usages de l’autre… “

http://eduveille.hypotheses.org/4504 

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