lundi 14 mai 2012

La plus grosse erreur de toute l’histoire de la physique


En théorie, il n’y a pas de différence entre la théorie et la pratique. En pratique, il y en a une.

Aujourd’hui nous allons voir ce qui est, à ma connaissance, la plus grosse erreur jamais commise en physique théorique, au moins au sens quantitatif. Elle concerne l’énergie du vide, cette quantité qu’on appelle parfois l’énergie noire.

Si jamais il vous est déjà arrivé de faire un calcul manifestement faux, et d’en être tout honteux : lisez ceci, ça va vous décomplexer !

L’énergie du vide en cosmologie

Les modèles cosmologiques qui décrivent l’Univers obéissent aux lois de la relativité générale d’Albert Einstein. Ce sont ses équations qui conduisent à la prédiction que notre Univers est actuellement en expansion, et qu’il y a 13.7 milliards d’années, il était dans un état très dense et très chaud. C’est un fait avéré aujourd’hui, mais initialement, Einstein ne croyait pas à la possibilité d’un Univers en expansion. C’est pourquoi il avait choisit de trafiquer artificiellement ses équations pour rendre l’Univers statique, en y ajoutant une composante mystérieuse : l’énergie du vide.

Après la découverte de l’expansion de l’Univers par Hubble en 1929, Albert Einstein a reconnu son erreur et supprimé l’énergie du vide de ses équations. Il l’a même qualifié de “plus grande erreur de sa carrière”. L’énergie du vide est donc restée au placard pendant 60 ans.

Mais au début des années 90, de nouvelles observations sont venues semer le trouble : plusieurs astrophysiciens ont en effet mis en évidence l’accélération de l’expansion de l’Univers; cela leur a valu d’ailleurs le prix Nobel de physique 2011. Mais pour expliquer cette accélération inattendue, les cosmologistes ont finalement dû ré-introduire l’énergie du vide qu’Einstein avait abandonné.

Depuis on a même pu estimer précisément sa contribution : près de 73% de l’énergie contenue dans l’Univers serait en fait cette mystérieuse énergie du vide, parfois qualifiée pour l’occasion d’énergie noire. Quantitativement on peut mesurer sa densité : environ 0.0000000000001 Joules par cm3. (nombre minuscule qu’on peut appeler aussi “10 puissance -13″ et noter )

Donc l’énergie du vide existe et on connait sa densité : ça, c’est la pratique, et jusqu’ici tout va bien. Là où ça se corse, c’est quand on essaye de calculer cette valeur à partir de la théorie.

L’énergie du vide en physique quantique

En cosmologie, l’énergie du vide n’est qu’une donnée d’entrée, un paramètre astrophysique que l’on mesure. Mais la physique quantique, qui régit le monde au niveau microscopique, nous explique d’où vient l’énergie du vide, et nous permet la calculer. Alors voyons si ça colle.

Pour comprendre l’origine de l’énergie du vide en physique quantique, il faut se rappeler du principe d’incertitude de Heisenberg : il n’est pas possible de définir précisément à la fois la vitesse et la position d’un objet. Essayons de voir ce que ça donne avec un simple ressort.


C’est une situation classique dans les problèmes de mécanique au lycée : on considère une masse M fixée à l’extrémité d’un ressort de raideur K. En physique classique, le système peut très bien être au repos complet : la masse étant dans la position x=0, à une vitesse v=0 : l’énergie totale du système est nulle (voir ci-contre).

Mais en physique quantique, ça n’est plus possible puisque x et v ne peuvent pas être tous les deux simultanément précisément nuls. Cela veut donc dire que la position et la vitesse de la masse subissent des petites fluctuations quantiques, qui impliquent que l’énergie totale du système ne peut pas être strictement nulle.

Eh bien dans le vide, c’est pareil ! Prenons le champ électromagnétique, composé comme son nom l’indique du champ électrique E et du champ magnétique B. Ces deux-là subissent la relation d’incertitude d’Heisenberg et ne peuvent pas être tous les deux nuls en même temps. Moralité : même dans le vide, ces deux champs ont des petites fluctuations, et une énergie associée qui ne peut pas être nulle. C’est ce qu’on appelle l’énergie du vide, et on peut se la représenter comme si en chaque point de l’espace il y avait des tas de petits ressorts subissant des fluctuations quantiques.

Ça c’est qualitativement ce qui se passe. Maintenant quantitativement, on va rigoler. Si on applique les principes de la physique quantique pour calculer effectivement cette énergie du vide, on arrive au résultat suivant : 10^107 J/cm3. Oui oui, vous avez bien lu, 10 puissance 107, soit 1 suivi de 107 zéros : une énergie énorme, astronomique, démentielle !

Si on compare le calcul fait en physique quantique à la valeur mesurée en astrophysique, on se rend compte que les deux diffèrent d’un facteur “10 puissance 120″ ! Je pense qu’on peut sans trop de risque dire qu’il s’agit de la plus grosse erreur jamais faite par une prédiction théorique ! Et il s’agit aussi d’un des problèmes les plus importants de la physique théorique actuellement : pourquoi l’énergie du vide est-elle si petite (en pratique), alors qu’elle devrait être si grosse (en théorie) ? Résoudre ce dilemme devrait nous permettre d’en savoir plus sur la structure quantique de l’espace-temps, mais aujourd’hui, personne n’a réussi !

http://sciencetonnante.wordpress.com/2012/05/14/la-plus-grosse-erreur-de-toute-lhistoire-de-la-physique/

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