mardi 24 mai 2011

Tunisie cherche touristes désespérément

Faut-il encore avoir peur d'aller en Tunisie?
Les événements qui ont actuellement lieu en Libye, avec qui le pays partage plus de 400 km de frontière ont-ils des répercussions? Les images de la Révolution de Jasmin qui ont conduit l'ex-président Ben Ali à quitter le pouvoir le 14 janvier dernier continuent-elles de tenir les touristes loin du pays?

Autant de questions qui ont trouvé une réponse grâce à un récent voyage organisé par le voyagiste Sultana Tours en collaboration avec l'Office du tourisme tunisien.

Tunis, la capitale économique et commerciale du pays, est aussi un lieu de passage obligé de nombreux visiteurs qui se promènent et magasinent pendant des heures dans les ruelles étroites du souk de la médina (la vieille ville).

En ce lundi d'avril, le contraste entre l'effervescence des marchands et l'absence des touristes est frappant. Nous nous enfonçons dans ce dédale de senteurs et de couleurs et avons presque l'impression que le souk est ouvert uniquement pour nous. Nous croiserons en effet très peu de visages occidentaux. Les marchands nous invitent en Français à venir visiter leur échoppe et nous faisons une pause sucrée en dégustant des makrouds aux dattes, une pâtisserie succulente en forme de losange.

Quelques mètres plus loin, Heitem Saoiadhi, un commerçant de la Medina nous résume la situation, le sourire aux lèvres.
«Il n'y a plus de touristes en Tunisie, mais ce n'est pas grave, nous sommes libres maintenant ! On peut discuter ensemble toi et moi en pleine rue sans que la police ne vienne nous demander des comptes. Je suis confiant, les touristes vont finir par revenir, ce qui compte c'est que nous soyons libres».

Autour de Tunis
Au nord de Tunis, Carthage est notre prochaine étape. La visite de cette cité, jadis détruite et reconstruite par les Romains, révèle de nombreux sites archéologiques classés au patrimoine mondial de l'UNESCO. Ruines séculaires et encore… désert touristique.

Nous poursuivons notre voyage dans une Tunisie souriante et accueillante. Les visages sont ouverts et les discussions s'engagent facilement. Dans les rues de Sidi Bou Saïd, ce pittoresque village aux maisons bleues et blanches, quelques étudiants des beaux-arts s'appliquent à reproduire la beauté de ces maisons à l'architecture arabo-andalouse.

Nous nous enfonçons dans le sud du pays et faisons escale dans les villes côtières d'Hammamet et de Sousse. Là aussi, les marchands attendent désespérément les touristes. À Monastir, le mausolée d'Habib Bourguiba, le premier président du pays, se visite religieusement. Nous croisons deux touristes français qui nous confient visiter le pays depuis maintenant dix ans. Selon eux, rien n'a changé depuis la Révolution, si ce n'est la désertion des touristes.

Arrivé à El Jem, c'est un formidable bond dans le temps que nous faisons en visitant l'amphithéâtre romain, une construction datant du IIIe siècle. Sous un soleil matinal, mais déjà intense, nous imaginons les combats de gladiateurs qui eurent lieu autrefois dans ces ruines.

Toujours plus au sud, nous nous plongeons dans une ambiance plus contemplative. Nous sommes à Matmata, un village à flanc de montagne construit à 600 mètres d'altitude et qui offre des points de vue face auxquels il est difficile de rester de marbre. Autre intérêt du site: les habitations troglodytes, ces maisons creusées dans la montagne. Contre quelques dinars tunisiens, il est possible d'en visiter certaines.

SAHARA
Un bain de foule des plus dépaysant nous est offert en la ville de Douz, surnommée la «Porte du Sahara». Le marché populaire de la ville est un incontournable passage dans la visite du pays. Dans une ambiance chaleureuse, les vendeurs de moutons, de chèvres et de poules négocient âprement leurs bêtes tandis que plus loin les marchands de fruits et légumes colorent leurs étals de mille couleurs.

Quelques heures plus tard, un autre spectacle nous coupera le souffle, la vue majestueuse du lac asséché de Chott El Jerid de Tozeur, une étendue saline de 5000 mètres carrés. L'illusion d'optique est parfaite, on jurerait un vrai lac. Plus tard canyon et l'oasis de Midès nous donneront le vertige; insaisissables beautés naturelles de ce site situé à proximité de la frontière algérienne.

Quelques heures de route et c'est un voyage dans le 7e art que nous faisons. Nous sommes à Nefta, en plein désert. Nous progressons dans les dunes brûlantes quand soudain un village abritant d'étranges fusées apparaît devant nous. Mirage ? Non, il s'agit du décor de «La guerre des étoiles», conservé en l'état. Dépaysant.

Au terme de ce voyage au coeur de la Tunisie, il est bien difficile de ne pas tomber amoureux du pays tant celui-ci est riche, varié et beau. En ce qui concerne la sécurité, nous n'avons jamais senti la moindre tension en parcourant les rues, pas de regard hostile, bien au contraire. Entre l'image que l'on perçoit à travers les médias et la réalité, il y a comme une dissonance.

«J'ai passé cinq semaines en Tunisie, dans toutes sortes de milieux sociaux et je ne me suis jamais senti en danger, au contraire, nous a confié Patrick Bellerose, un journaliste indépendant québécois qui vient de passer cinq semaines en Tunisie. Les Tunisiens sont incroyablement accueillants, particulièrement depuis la révolution, ils ont envie de partager avec le reste du monde leur joie d'être enfin libres de la dictature.»

Le taux d'occupation de nombreux hôtels est de seulement 10 % et les voyages en Tunisie se toujours encore mal. «Nous avons eu 50 % d'annulation pour la période janvier-mars», dit Serge Deslongchamps, responsable des relations publiques de Sultana Tours, une agence de voyages montréalaise spécialisée dans les voyages aux Maghreb.

Malgré la désertion des touristes, les Tunisiens que nous avons rencontrés restent confiants dans l'avenir de leur pays. Les élections à l'Assemblée constituante le 24 juillet prochain devraient donner au pays un ciment politique nécessaire à sa reconstruction. La Tunisie est belle et libre et est plus que jamais à découvrir.



BON À SAVOIR
Comment s’y rendre?
Cela fait des années que l'on en parle, mais la liaison directe Montréal-Tunis n'existe malheureusement pas encore, même si Tunis Air a récemment annoncé qu'elle sera ouverte en mai 2012. En attendant, pour vous rendre en Tunisie, il vous faudra emprunter les avions d'Air Maroc ou d'Air France et faire une escale respectivement à Casablanca et Paris.

Combien de temps y aller?
La plupart des tours opérateurs québécois proposent des circuits de six à 29 jours en Tunisie ou des circuits en combiné avec d'autres pays comme l’Égypte. Si vous en avez la possibilité, privilégiez les longs séjours, plus intéressants financièrement. Les voyagistes comme Sultana Tours, Jolivac, Rêvatours, Aviatours ou Exotik Tours proposent ce genre de circuits.
Un circuit de 16 jours (14 nuits) en hôtel à l'automne prochain par Sultana Tours vous coûtera par exemple à partir de 1600$ (selon la période).
Les prix vont-ils baisser après les événements?
Non. Les conditions de travail des employés de l’hôtellerie s'étant améliorées, les coûts de gestion ont augmenté, ce qui a des répercussions directes sur le prix des circuits. Il est même probable que les prix augmenteront légèrement dans les prochains mois. La destination reste cependant toujours très abordable.

Quand partir?
Le printemps et l'automne sont les meilleures saisons pour découvrir la Tunisie. Les mois de mai, juin et septembre sont particulièrement agréables.

Coût de la vie en Tunisie
Le coût de la vie est plus faible qu'au Québec. Pour les budgets les plus petits, vous pourrez vous en sortir avec 25 dinars tunisiens (DT) par jour. On peut en effet manger pour 5 DT dans les restaurants locaux et se loger pour 10 DT ou 15 DT dans des hôtels au confort sommaire. Pour les budgets moyens avec la recherche d'un certain confort, prévoyez 30 à 50 DT par jour.

Un mot sur l’habillement
Bien que musulman, le pays est très tolérant et beaucoup de femmes ne portent pas le voile. Pour les femmes occidentales en visite, les vêtements habituels feront l'affaire. Ce voyage a été rendu possible grâce au bureau canadien de l’Office national du tourisme tunisien, à Sultana Tours et à TWS.

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David Nathan
canoe.ca

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